Page:Kipling - Du cran.djvu/206

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bot marcher un arbre à vis nu, vous pouvez vous rendre compte de ce qui était arrivé au Sarah Sands. Ils attendirent qu’il fît jour pour entrer à Port-Louis, et faillirent se mettre en pièces sur un récif de corail. Puis le steamer dévasté, vidé, fit son entrée — fort sale, les vêtements des hommes si carbonisés que c’est à peine s’ils osaient les enlever, et tous affamés ; mais n’ayant pas perdu une âme. Port-Louis leur offrit un banquet public sur la place du marché, et les habitants français se montrèrent d’une politesse charmante, comme le savent se montrer seulement les Français.

Mais les annales ne disent rien de ce qu’il advint des matelots qui « remirent le navire à perdition ». Certain mémoire se contente d’insinuer que « ce n’était pas le moment de sévir » ; mais il est probable que les troupes rendirent leur propre justice durant les douze jours de cahin-caha vers le port. Les hommes qui avaient leur hamac à l’arrière, les officiers et les femmes perdirent tout ce qu’ils possédaient ; et les compagnies qui avaient leur hamac à l’avant leur prêtèrent des vêtements, et de la toile pour s’en faire une sorte d’habillement.