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— Mon cher garçon, je sais tout cela, et même plus. Je l’ai fait observer et on m’a répondu que je témoignais d’« un préjugé coupable et puéril ». Par Jupin ! si les Kushru Kheyl ne témoignent pas de quelque chose de pire encore, je ne connais plus la Marche ! Il y a des chances pour que vous ayez sur les bras un soulèvement du district, et il me faudra quitter ma besogne pour aller vous aider à en venir à bout. Je n’ai pas besoin de vous demander de soutenir le Bengali en toute circonstance. Vous le ferez, pour l’amour de vous-même.

— Pour celui d’Orde. Car personnellement je ne puis dire que je m’en soucie pour deux sous.

— Ne dites pas de bêtises. C’est assez fâcheux, Dieu sait, et le gouvernement le saura plus tard, mais ce n’est pas une raison pour vous de bouder. Il vous faut essayer, vous, de faire marcher le district ; il vous faut le mettre, lui, le plus possible à l’abri de l’insulte ; il vous faut lui montrer le maniement de tout ; il vous faut pacifier les Khusru Kheyl et ne pas manquer à l’occasion d’avertir Curbar, de la gendarmerie, de veiller au grain. Moi, vous me trouverez toujours au bout du fil télégraphique et disposé à risquer ma réputation pour garder le district en bon état. Vous y perdrez la vôtre, comme de juste. Si vous maintenez les choses en ordre, et s’il ne reçoit pas de coups de bâton en faisant sa tournée, c’est lui qui en retirera tout l’honneur. Si quelque chose va de travers, on vous dira que vous ne l’avez pas soutenu loyalement.

— Je sais ce que j’ai à faire, dit mélancoli-