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landais. C’était une chaise très étonnante… toute doublée de soie rose et garnie de rideaux de soie rouge. « La voilà, que dit le rougeaud. — La voilà, que disent les coolies en souriant jaune. — Peut-elle te servir à quelque chose ? que dit le rougeaud, — Non, que dit le coolie ; j’aimerais vous en faire cadeau. — Je l’accepte très volontiers », que dit le rougeaud. Et là-dessus tous les coolies de pousser des cris sur un ton prétendument joyeux, et s’en retournant à leurs terrassements ils me laissèrent seul dans le hangar. Le rougeaud me vit, et sa figure tourna au blanc sur son gros cou apoplectique. « Que venez-vous chercher ici ? qu’il me dit. — Un abri et rien de plus, que je réponds, si ce n’est peut-être ce que vous n’avez jamais eu, c’est-à-dire de la politesse, scélérat de faiseur de loteries, car je n’étais pas disposé à laisser marcher sur le pied à l’uniforme. — Hors d’ici, qu’il dit. C’est moi qui ai la surveillance de ce chantier de construction, qu’il dit. — C’est moi qui ai la surveillance de moi-même, que je dis, et il est probable que je resterai un moment. Faites-vous beaucoup de loteries par ici ? — Qu’est-ce que ça vous fait ? qu’il dit. — Rien à moi, que je dis, mais beaucoup à vous, car parbleu, je pense que vous tirez de cette chaise à porteurs une bonne moitié de votre revenu. C’est toujours comme ça que vous la mettez en loterie ? » que je dis. Et là-dessus je m’approchai d’un coolie pour lui poser des questions. Les gars, cet homme s’appelle Dearsley, et il y a déjà neuf mois qu’il met en loterie mensuellement cette vieille chaise à