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tomber à bas de la table. Sa conception du monde s’écroulait.

— Venez dehors, dit Mulvaney.

Et comme les occupants de la chambre s’apprêtaient joyeusement à les suivre, il se retourna et leur lança rageusement :

— Il n’y aura pas de bataille ce soir… à moins que l’un de vous ne soit désireux d’y prendre part. Que celui qui y est disposé nous suive.

Personne ne bougea. Les trois sortirent au clair de lune, Learoyd tout en défaisant fiévreusement les boutons de sa tunique. À part les chacals glapissants, le champ de manœuvres était désert. L’impétueux élan de Mulvaney avait déjà entraîné ses compagnons au loin en terrain découvert lorsque Learoyd tenta de se retourner et de reprendre la discussion.

— Restez tranquilles à présent… Jock, ç’a été ma faute du début des choses au milieu de la fin. J’aurais dû commencer par des explications, mais je te le répète, Jock mon bon, sur ton âme, es-tu prêt, penses-tu, pour le combat le plus beau qui fut jamais… un meilleur que de te battre avec moi ? Réfléchis avant de répondre.

Plus que jamais intrigué, Learoyd fit deux ou trois tours sur lui-même, tâta son biceps, essaya d’un coup de pied, et répondit :

— Je suis prêt.

Il avait l’habitude de se battre aveuglément sur l’ordre de l’intelligence supérieure.

Ils s’assirent à terre, surveillés de loin par les