de fraîcheur, ou du moins une brise moins lourde, et, rafraîchi par elle, je me tourne pour contempler la Cité de l’Épouvantable Nuit.
Quelle illustration pour un Gustave Doré ! Quelle description pour un Zola ! — le spectacle de ces milliers d’humains dormant au clair de lune et dans son ombre. Les terrasses des toits sont bondées d’hommes, de femmes et d’enfants ; et l’air est plein de bruits indiscernables. On ne repose pas, dans la Cité de l’Épouvantable Nuit ; et ce n’est pas étonnant. La merveille serait qu’on y pût respirer. Si vous examinez attentivement la multitude vous vous apercevez qu’elle est presque aussi agitée qu’une foule en plein jour ; mais le tumulte est atténué. Partout, dans la vive clarté, vous distinguez les dormeurs qui se retournent de côté et d’autre, qui sortent de leurs lits et s’y réinstallent. Dans les cours des maisons pareilles à des puits il y a le même mouvement.
La lune impitoyable le montre tout entier. Elle montre aussi les plaines à l’extérieur de la ville, et çà et là en dehors des murailles, large comme la main de la Ravee. Elle montre enfin un scintillement d’argent qui s’éclabousse sur un toit de maison presque directement au-dessous du minaret de la mosquée. Un pauvre malheureux s’est levé pour répandre une jarre d’eau sur son corps enfiévré ; le ruissellement de l’eau qui s’écoule frappe légèrement mon oreille. Deux ou trois autres humains, en des coins éloignés de la Cité de l’Épouvantable Nuit, suivent son exemple, et l’eau reluit comme des éclairs d’hélio-