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L'AME DES SAISONS

Sarcelles, poules d’eau, pluviers, cygnes-trompettes,
Tous ceux que l’édredon vêt de neige proprette,
Ceux dont le col est vert moiré de reflets bleus,
Ceux dont le col serpente en reptile onduleux,
Tous ceux dont le bec plat fait des cris monotones,
Tous ceux qui vont plaquant dans l’eau leurs pattes jaunes,
Et le peuple héron qui darde ses longs becs
Avec des râles sourds ou des claquements secs,
Ceux qui rêvent, ployant sous leur aile une patte,
Ceux qui portent au front une houppe écarlate,
Ceux dont le poitrail blanc est de rose flammé,
Ceux qui gloussent, gonflant leur jabot emplumé,
Ceux dont un fin manchon cerne la tête rase,
Ceux dont le bec se renfle ou s’effile à la base,
Tous ceux qui vont le col courbé dans les roseaux,
Tous ceux qui plongent et barbotent dans les eaux,
Tout le peuple hagard qui siffle dans les nues,
Oies sauvages, vanneaux, plongeons, cigognes, grues,
Oh ! songe qu’ils sont là, jabotant, jacassant,
Parmi le clapotis du cristal frémissant,
A l’heure vespérale où dans les eaux se baigne
Un globe d’or qui brûle et de braise qui saigne
Et où, sur l’horizon fantastique et vermeil,
De loin en loin, le col tendu vers le soleil,
De gigantesques cerfs détachent leurs ramures...