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L'AME DES SAISONS


Et dormons. — Mais d’où vient qu’en l’absence de lampe
La nuit ait des clartés de grisaille et d’estampe ?...
Las ! On dort mal, les yeux ouverts. Cela suffit.
Il est sot de muser et d’écouter au lit
L’horloge de la mort qui bat dans la muraille...
 
Tumulte. Des chevaux piaffent. On ferraille.
De la lumière. Cris. Un tremblement blafard.
Est-ce qu’on assassine un homme quelque part ?...
Non. C’est une voiture. Ecoute... Elle est passée.
Elle a dû cahoter longtemps sur la chaussée
Où son œil rouge était seul à luire à travers
La solitude de la pluie et des bois verts...
(Il y a cependant des chats maigres qui rôdent.
Ils font beaucoup de tort au gibier. Ces maraudes
Félines font saigner les perdreaux grelottants.
Il y avait aussi des voleurs, dans le temps...)
Il ne pleut plus. — C’est stupéfiant, le silence !
Il ne se tait jamais tout à fait, quoi qu’on pense.
Il chuchote. On entend quelque chose toujours.
L’espace est une mer de bruits profonds et sourds,
Et quand les bruits qui sont à la surface meurent,
On dirait que Dieu parle et que les anges pleurent...
Jadis, lady Macbeth entendit cette voix,
Chacun de nous l’entend dans l’ombre quelquefois,