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L'AME DES SAISONS

Gnomes trapus marchant en file au creux des rocs,
Tout ce qu’un écolier peut rêvasser en classe...
L’œil humide, je suis resté longtemps en place,
Pâle, le cœur fondant d’un émoi triste et doux,
Avec un grand besoin de pleurer à genoux...

Alors, j’ai tout revu : la classe aux noirs pupitres
Où le soleil, fusant clair à travers les vitres,
Plaquait des flaques d’or ; la chaire, le tableau,
Avec l’exemple inscrit en un vers de Boileau,
La carte d’Amérique où, dans la verte zône,
En large ruban bleu s’allongeait l’Amazone,
Tandis qu’en haut s’évaporait le Labrador,
Le petit professeur portant lunettes d’or,
Expliquant Télémaque avec des hoche-téte
Si drôles ! Les copains dont l’œillade secrète
Vous logeait à la bouche un rire folichon,
Moussant frais, comme un vin clairet sous le bouchon,
Et pst ! la plume aux doigts et le nez dans le livre,
Avec de fins trémoussements de fauvette ivre.
 
Moi, je ne restais coi que lorsque je révais.
 
O rêves de jadis, oiseaux au blanc duvet,
Dont le chant me berçait comme un épithalame,