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pousse jusqu’à devenir lourd, mais jamais il ne reste au-dessous de son effet. Il se risque souvent à le dépasser et me fait penser à ces barytons qui ont une belle voix et qui ; ne se contentant pas de chanter, se mettent à crier. C’est la mode aujourd’hui au théâtre, on crie et on ne chante plus, mais en peinture c’est tout le contraire, on ne chante même plus, on fredonne, et ma foi je ne me sens pas le courage d’en vouloir à qui sait encore élever la voix, même pour crier.

M. Armand Leleux est aussi un peintre fort distingué, et qui, comme son frère, mérite toutes les sympathies. Dans ses petits tableaux d’intérieurs, il abuse aussi quelque peu des contrastes. À force de les employer à produire le relief, il se rend dur et un peu noir ; les figures viennent ainsi fort en avant, mais te tableau manque d’air et d’espace. Les toiles de M. Armand Leleux, malgré ces défauts peu sérieux, produisent une impression vive et soudaine. On aime ce coloris qui tient à la fois des Flamands et des Espagnols, et qui s’attache à des figures naïvement conçues et curieusement étudiées. MM. Adolphe et Armand Leleux sont des artistes auxquels on sait gré de leurs progrès parce qu’on aime leur talent consciencieux, modeste, ennemi de toute réclame