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voudrais bien vous épouser ; les bras raides, les mains jointes, les prunelles convulsées, les sourcils arqués vers le ciel, signifient : Ô mon Dieu ! que je suis malheureuse.

Du reste, les expressions du visage sont nulles ; un placide sourire mélancolique, qui veut être douloureux, mais qui ne lest pas, tient lieu de pensée, d’intérêt, d’action même. Les teintes, qui veulent être les plus sombres, sont tendres malgré le peintre. Dans un décaméron, il eût fait du rose tendre, du vert céladon, du jaune tendre et du bleu tendre. Dans ce tableau, qui aspire à l’effet dramatique, il fait du brun tendre, du sombre tendre, du noir chatoyant, du foncé qui se pâme. Tout cela plaît lorsque l’artiste voudrait toucher ; tout cela est charmant et sans valeur ; le peintre voudrait être intéressant, et n’arrive qu’à une grâce molle et monotone, à une grâce un peu plus assourdie par la nature du sujet, mais que ne rehausse ni l’élévation du style, ni l’étude consciencieuse. C’est là une douleur d’opéra-comique, un dessin élégant sans fermeté, une peinture fluide, molle, estompée, adroite, sûre comme un parafe, agréable, mais froide et restant toujours étrangère à tout sentiment, à toute passion.

Heureusement pour moi, je puis me dédomma-