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loin. Et puis l’action est toujours préférable à la simple volonté, celui qui prie en action prie bien mieux que celui qui ne prie qu’en pensée.

Voyez, par exemple, cette jeune femme qui mène paître dans un champ inculte sa vache amaigrie. Il y a dans sa pose immobile et patiente, il y a dans sa tournure, il y a dans sa laideur même tant de caractère et de sérénité douloureuse, il y a dans l’ensemble et dans les détails un style si évident, si grand, une telle indifférence pour ce qui est détail individuel, une telle intelligence de tout ce qui est trait de caractère, que cette figure est devenue un type. On dirait une statue de la résignation.

Quant au tableau refusé par le jury : la Mort et le Bûcheron, c’est certainement le poëme le plus saisissant que l’on puisse imaginer ; c’est la traduction la plus naïvement indépendante de la fable de La Fontaine. Le bûcheron est tombé épuisé auprès de son fagot. La Mort vient. La Mort, pour ce pauvre vieillard, c’est certainement l’amie qui délivre. Mais non ! le vieillard tient encore à la vie ; que dis-je ? il tient à ses souffrances, il tient à ses rudes travaux, il se cramponne à son fagot, qu’il maudissait tout à l’heure. Cet amour