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naïve de la réalité, c’est un peintre de procédé, demandant ses effets à l’originalité de la manière et à la dextérité de la main. Il ne s’adresse pas à l’esprit, mais aux yeux. Qu’importe le sujet qu’il traite ? que ce soit le mariage de Henri IV, la cérémonie de l’église de Delft, un antiquaire, une marchande de poissons nacrés ou un naufrage, l’aspect sera aussi brillant. Les figures pétilleront, brilleront comme des fleurs, les lumières ruiselleront ; vous verrez des grappes de figurines éblouissantes ; l’esprit s’amusera, l’œil se régalera, vous aurez un tableau divertissant, peint grassement, d’une touche vive, originale, heureuse, peint par un artiste profondément maître de son ingénieux procédé, et qui veut que nul souci, nulle inquiétude ne troublent jamais le spectateur.

Le sujet du tableau de M. Isabey est un incendie en mer. Lisez la notice, c’est effrayant. Voyez le tableau, c’est charmant. Quel tour de force ! Comme ils sont accusés, les reliefs de ces agrès désemparés, comme ces vagues sont joliment fouettées, comme la couleur pétille sur ces grappes d’hommes qui tombent à la mer, avec de chatoyants effets d’un rendu prodigieux ; quelles mosaïques de têtes blondes et brunes, de corps ruisselants d’étoffes spontanément écloses dans