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Comprenez-vous dans quel embarras serait un artiste d’une foi douteuse, d’un caractère faible mais consciencieux, qui chercherait à recueillir les diverses opinions de ce public auquel il se consacre ? La situation d’Eugène Delacroix est tout à fait digne de remarque à cet égard. Après trente-cinq ans de glorieux travaux, sans cesse discuté, combattu, nié même, il possède cependant un des deux plus grands noms de la peinture actuelle. M. Ingres seul est adopté et contesté avec autant d’obstination.

Les partisans de l’un concluent à l’anéantissement de l’autre. Qui donc a raison de ces deux grands antagonistes ? Ils ont raison tous les deux. Devant le magnifique plafond d’Homère, on préfère les splendeurs de la coupole de la bibliothèque du Sénat, nous nous sentons pris d’émotions diverses, ralliés à un sentiment commun : l’admiration.

Ces nobles artistes, également convaincus et fidèles à leurs principes, ne se sont jamais démentis et ont laissé au débat toute son intégrité.

Continuellement sur la brèche, Eugène Delacroix, tandis que M. Ingres expose à huis clos pour quelques adeptes, envoie, lui, chaque année, plusieurs tableaux toujours hardis, passionnés, véri-