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monde. Un de ces paysages en faveur auprès des belles dames est le Chant du rossignol, par M. Gompte-Galix ; voilà un joli parc et de charmantes femmes, assises au clair de la lune pour écouter le chantre des nuits !

Vous l’avouerai-je ? pour moi, c’est un tableau manqué. Pour peindre le chant du rossignol, il ne fallait pas nous montrer toutes ces femmes en costume Louis XV, assises dans un jardin comme dans une loge à l’Opéra. Le chant du rossignol emporte avec lui l’idée de solitude. Il ne doit pas faire penser, il fait rêver, le chant du rossignol, c’est une des voix de cette musique indéfinie de la nature qui n’inspire que des sentiments inexprimables, qui se compose de la brise qui passe en murmurant des syllabes sans suite, des plaintes de la nuit, des gémissements que le souffle du crépuscule arrache aux plantes, de tous ces mots mystérieux qui n’ont pas d’orthographe.

Cette musique-là n’a pas affaire aux lois du contre-point ou aux règles de la composition, et cependant quel opéra vous cause une plus vive émotion que ce doux et sublime langage, que ces mélodies délicieuses qui s’élèvent au loin dans la profondeur de la nuit, et semblent continuer