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donne à lui, il lui vend son âme, pourquoi ? pour séduire Marguerite ! au moins pour qu’il lui donne un objet qui ait touché sa personne ! « Procure-moi, lui dit-il, le mouchoir qui a touché son sein, la ceinture qui a serré sa taille. » Le beau mystère ! et que c’est bien la peine d’avoir recours à cette intelligence supérieure de Satan ! Voyez si Chérubin amoureux a besoin de Méphistophélès pour emporter le ruban qui a touché les beaux cheveux de sa chère marraine. Se donner au diable pour un mouchoir !

Et qu’il est bête, ce Méphistophélès ! Voilà une jeune fille simple, naïve, innocente, il suffit de l’aimer pour qu’elle vous aime ; le butor la séduit en lui donnant des diamants et des perles. Figaro, cent fois plus spirituel que Méphistophélès et cent fois plus vrai, se fût contenté de lui donner des fleurs et de lui jouer un air de guitare.

Faust était donc, à mon avis, le poëme le moins propre à inspirer Scheffer. C’est le poëme ironique par excellence ; c’est un poëme sans émotion et sans amour ; c’est même, je vais plus loin, un poëme sans rêverie, sans idéal. Montrer le diable, donner un corps au rêve, c’est tuer le rêve. Faust est un poëme qui appartient à Eugène Delacroix, ce démon de la couleur. Scheffer n’y a trouvé