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I. La méditation est essentiellement immanente tandis que le paradoxe et la foi forment à eux une sphère qualitative. Au point de vue de l’immanence, toute différence dans les relations de l’homme à l’homme en tant qu’homme n’est qu’un élément devant la méditation vraie et éternelle. Valide momentanément, — sa validité se réduit pourtant à rien devant l’identité éternelle. Le génie — comme l’indique le mot (ingenium), l’inné, (prunus), la primitivité, l’originalité (origo), c’est l’immédiateté, le don de la nature. On est homme de génie dès la naissance. Bien avant qu’il soit possible de juger si l’homme de génie va ou ne va point consacrer à Dieu ses moyens remarquables, il est homme de génie et restera tel quand même il ne se réfère point à Dieu. L’homme de génie va peut-être se métamorphoser et parvenir à avoir la conscience de lui-même. Le mot de paradoxe appliqué à la nouvelle idée que propage alors l’homme de génie, n’indique qu’un état transitoire, l’anticipation qui a passé en paradoxe pour s’évanouir ensuite. L’homme de génie devance de plus d’un siècle, peut-être, ses contemporains, et ceux-ci finissent par adhérer au paradoxe qui, par conséquent, ne leur paraît plus tel.

Quant à l’apôtre il en est tout autrement, le mot même nous le dit. On n’est point apôtre dès la naissance. L’apôtre est l’envoyé de Dieu.