Aussitôt son arrivée à Rennes, Mme Le Gris avait fait prier son éloquent défenseur, M. Lanjuinais, de venir la voir à la prison, ce qu’il fit avec un grand empressement, en se mettant de nouveau à ses ordres.
Il voyait souvent ces Dames et les secondait dans les démarches jugées nécessaires pour arriver à une heureuse solution.
Bientôt, l’opinion publique s’occupa beaucoup de la belle et spirituelle prisonnière : elle recevait de
oncle, sans le secours de personne. Connaissant parfaitement les habitudes et les habitants du pays, il se rendit une nuit à la maison du président du tribunal révolutionnaire, homme plutôt terrorisé que méchant, et frappa discrètement à la porte.
La domestique du président ne tarda pas à paraître à une fenêtre.
— Qui est là ? demanda-t-elle.
— Un envoyé du Comité révolutionnaire du département, porteur d’une pièce de la plus haute importance à remettre au président, à lui seul ; cela ne demande aucun retard ; il faut qu’il me reçoive absolument.
Après quelques lenteurs, M. Le Gris Duval fut introduit dans la chambre du président, dont il était parfaitement connu.
Ce dernier était couché. À peine les rideaux du lit furent-ils entr’ouverts, que le brave homme recula épouvanté du côté opposé en s’écriant : M. Le Gris !
— Je n’en veux nullement à votre vie, mais vous avez fait arrêter M. Sevoy, et, si vous ne le faites pas mettre en liberté demain, vous subirez la peine du talion, je vous le déclare : vous savez que je suis en mesure de le faire. Sur ce, que Dieu vous garde !
Le lendemain, M. Sevoy fut mis en liberté, mais il jugea prudent de se retirer à Rennes.