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que par fois faisoit chiere triste, adoulée et plourable, tout ainsi comme homme qui, par diuerses parties de son corps, sent et seuffre diuerses passions et doulours, pour laquelle chose jettoye grams plaints et à Dieu lamentations de diuers coys ».

Voilà sans doute la plus singulière représentation du chaos qu’on ait jamais imaginée. Christine n’avoit pas voulu imiter Ovide, qui ne s’étoit pas arrêté à personifier un être de raison insusceptible d’être jamais, dans quelque acception que ce fut décrit sous l’assemblage des traits humains. Ovide, Hésiode, la Genèse, Sanchoniaton (si toutefois la traduction que Philon nous a donnée de ce dernier auteur n’est pas un ouvrage équivoque), offroient à notre Italienne de plus beaux modèles.

« Avant que la mer, la terre et le ciet qui les environne fussent produits,Funi vers entier ne présentoit qu’une masse informe. Cet amas confus, ce vain et inutile fardeau, dans lequel les principes de tous les êtres étoient confondus, c’est ce qu’on a appelle le chaos. Le soleil ne prêtoit point sa lumière au monde ; la lune ne parcouroit point un cercle réglé ; la terre n’étoit pas suspendue au milieu des airs, où son propre poids la soutient ; la mer n’avoit point de rivages ». Ce magnifique tableau que nous a tracé Ovide, du désordre de la nature, qu’un être Tout-puissant prit soin de combiner (car les anciens