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glorifier, comme si tu ne l’avais pas reçu ?[1] Il faut que l’orgueil plie sous cette parole, et que l’homme tout entier s’anéantisse en présence de celui qui seul le retire de l’abîme où le péché l’avait précipité. Il ne se relève qu’en s’abaissant ; ce qui faisait dire à saint Paul : Quand je me sens faible, c’est alors que je suis fort[2]. Je vous comprends, ô grand Apôtre ! ce sentiment qui vous humilie appelle la grâce promise aux humbles[3], et par elle vous êtes revêtu de la force de Dieu même. Que ne devons-nous point à ce Dieu de bonté, et que lui rendrons-nous pour tant de bienfaits ? Hélas ! dans notre indigence, nous n’avons à lui offrir que notre cœur, et c’est aussi tout ce qu’il demande de sa pauvre créature. Que ce cœur au moins lui appartienne sans réserve ; que rien ne le, partage ; qu’il ne veuille, qu’il ne goûte que Dieu, ne vive que de son amour ; et qu’ainsi commence sur la terre cette union ravissante qui sera plus tard notre éternelle félicité !


CHAPITRE XI.

DU PETIT NOMBRE DE CEUX QUI AIMENT LA CROIX DE JÉSUS-CHRIST.

1. Il y en a beaucoup qui désirent le céleste royaume de Jésus, mais peu consentent à porter sa Croix.

Beaucoup souhaitent ses consolations, mais peu aiment ses souffrances.

Il trouve beaucoup de compagnons de sa table, mais peu de son abstinence.

Tous veulent partager sa joie, mais peu veulent souffrir quelque chose pour lui.

Plusieurs suivent Jésus jusqu’à la fraction du pain, mais peu jusqu’à boire le Calice de sa Passion.

Plusieurs admirent ses miracles, mais peu goûtent l’ignominie de sa Croix.

Plusieurs aiment Jésus, pendant qu’il ne leur arrive aucune adversité.

Plusieurs le louent et le bénissent, tandis qu’ils reçoivent ses consolations.

  1. I Cor. iv, 7.
  2. II Cor. xii, 10.
  3. Jacob lv, 6.