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Helas ! à peine nous sommes-nous recüeillis un moment, qu’aussi-tôt nous nous répandons au dehors, & dans cette dissipation d’esprit, nous ne faisons nulle réflexion sur notre conduite.

Nous ne voyons pas combien les choses que nous aimons sont méprisables ; & quoi qu’il n’y ait rien dans nous que d’impur, nous n’en sommes point toucheż.

Tous les hommes autrefois étant tombez dans la corruption[1], un grand déluge qui survint, les fit tous perir.

Comme donc le fond de notre cœur est fort corrompu, il faut que les œuvres qui en viennent, & qui se ressentent de sa mauvaise disposition le soient aussi.

C’est dans un cœur pur, qu’est la racine qui produit les fruits d’une bonne vie.

On demande assez si un homme a fait de grandes actions : mais on ne demande pas s’il est porté à les faire par un grand motif de vertu.

On veut sçavoir s’il est vaillant, s’il est riche, s’il est bienfait, s’il a la voix bonne, s’il écrit avec politesse, s’il travaille délicatement : mais s’il est vraiment pauvre d’esprit, s’il a bien de la douceur & de la patience, s’il est fort devot & fort interieur, c’est dequoi on ne parle point.

La nature & la grace ont des ma-

  1. Gen. 6. 12.