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À LESBOS

— Nous ne lisons aucun journal, avoua madame Fernez.

— Voulez-vous me permettre de vous en prêter un chaque jour ? proposa Badère.

L’offre n’était pas compromettante, elle fut acceptée avec empressement. Maintenant Eugène avait un prétexte pour se présenter chez madame Fernez.

D’abord, il donna le journal sans dépasser l’antichambre.

Tant de réserve ne pouvait durer.

Une première fois, debout, comme un homme pressé, il s’entretint avec ces dames d’un événement politique.

Le jour suivant, il resta plus longtemps, tout en refusant le siège qu’on lui avançait.

À la fin de la semaine, il s’asseyait et prolongeait ses visites pendant plus d’une heure.

Peu à peu, il s’implanta chez madame Fernez, captant sa confiance, lui inspirant une sympathie de plus en plus vive.

Graduellement il devint l’hôte habituel de cette maison que le malheur avait rendue presque solitaire.

On le prenait pour un ami, on lui confiait toutes les peines du passé.

À ce contact journalier, Andrée sentit grandir son amour ; elle ne s’en effraya pas.