Page:Kellec - A Lesbos, 1891.djvu/81

Cette page a été validée par deux contributeurs.
79
À LESBOS

nez a abandonné sa femme et son enfant. Pour éviter de mourir de faim, elles ont accepté de travailler ; seulement, il est certain qu’Andrée avait rêvé autre chose que de faire de la passementerie.

Henri Lafont se tut ; puis il ajouta :

— Andrée est une nature fine, aristocratique ; elle doit beaucoup souffrir des privations qu’elle est obligée de s’imposer.

— Jeune et jolie, les protecteurs ne manqueraient pas, si elle voulait, répondit Eugène.

— La vertu, mon cher, est parfois chose facile à pratiquer. Mademoiselle Fernez est mal vêtue, elle ne sort jamais, les gentilshommes, avides de cueillir les fleurs nouvelles, ne peuvent venir la chercher au fond du Marais.

— Que conclus-tu ?

— Qu’Andrée est destinée à devenir une des plus charmantes horizontales de Paris, parce qu’un jour, elle se lassera de sa misère ; mais avant, il faut qu’elle se meurtrisse légèrement aux réalités de la vie.

— Je ne te comprends pas.

— Eh, mon cher, il faut qu’elle ait un amant, et qu’elle sache que désormais le mariage lui est rigoureusement interdit.