— Votre mère occupe-t-elle seule votre pensée, votre cœur ?
— Depuis longtemps je lui ai donné la meilleure part de moi-même ; il y en a une autre, je l’ai fait mienne et je la réserve pour mes amis, vous êtes de ceux-là.
Gustave s’inclina froidement, avec un vague sourire ironique.
Andrée tressaillit.
Une ombre passa sur son front,
— Savez-vous, dit-elle d’un ton saccadé, où l’on devinait de la colère contenue, que je suis en droit de m’étonner de votre façon d’agir ? À vos questions, au moins étranges, à votre attitude frisant presque l’inconvenance, on pourrait vous prendre pour un juge interrogeant un coupable.
Mademoiselle Fernez se redressa fièrement, l’œil hautain, la lèvre frémissante, et ajouta :
— Si c’est une gageure, finissons au plus vite cette plaisanterie, qui a déjà trop duré, notre amitié s’y amoindrirait.
— Vous ne voulez pas entendre à demi-mots ?
— Non, soyez net et précis, cela conviendra mieux à votre caractère et au mien.
— Ignorez-vous les bruits-cancans d’ateliers et autres lieux qui courent sur votre compte ?