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À LESBOS

Laurence se souleva, le front teinté des lueurs passagères des éclairs.

— Je suis une paria, fuis-moi, un jour tu me mépriseras, lorsque tu n’entendras plus les chants de ton cœur.

— Je t’aime surtout parce que tu as souffert, je t’aime martyre, et je veux, dans de folles étreintes, effacer jusqu’au souvenir de toutes tes douleurs !

Que ces fleurs, dont le parfum nous enivre, que ces sons harmonieux qui nous transportent, que cet orage lointain qui ne peut nous atteindre, soit l’image de notre existence future.

Mon amour jettera sans cesse sur tes pas une jonchée de fleurs, et mes chants seront si doux, qu’ils te berceront et te transporteront loin de ce monde de misère, et jamais plus tu ne sentiras l’aiguillon et la souffrance !

Laurence, à bout de force, poussa une exclamation de joie sauvage et tomba haletante sur la poitrine d’Andrée.

Ce ne fut plus dans l’atelier qu’une symphonie de baisers, se mêlant aux accords majestueux de l’orgue ; aux coups sourds de l’orage fondant sur Paris, répondaient les spasmes des deux Lesbiennes, s’enlaçant et se roulant en d’érotiques ébats.