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TRENTE ANS


 
Nous ne vivons jamais : nous attendons la vie.
VOLTAIRE.




I


Des monts lointains de la jeunesse
Je vois déjà pâlir l’azur :
Le temps m’entraîne avec vitesse,
Et, comme au fond d’un antre obscur,
Son char léger roule, et m’emporte
Sous l’arche sombre de la porte
Qui conduit l’homme à l’âge mûr.
Arche sinistre ! à ton entrée,
Je sens mon âme resserrée :
Semblable au pauvre voyageur,
Qui, vers le soir, las et débile,
Arrive aux portes d’une ville
Où rien de cher n’attend son cœur.
Que l’ombre est froide sous ta voûte !
Qu’à mon oreille qui l’écoute
Triste est l’écho, qu’à chaque pas
La roue éveille avec fracas !
Ah ! franchissons l’étroit passage !
Quand je l’aurai fui sans retour.
Peut-être à mon nouveau séjour
M’habituerai-je avec courage !