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POÈMES ET POÉSIES


Ô SOLITUDE

Ô Solitude ! si je dois habiter avec toi,
Que ce ne soit pas parmi les entassements confus
De sombres masures ! Gravis avec moi le pic escarpé, —
Observatoire de la nature, — d’où le vallon
Avec ses pentes fleuries et le gazouillis cristallin de sa rivière,
Puisse sembler un empan [1] ; que je passe tes veillées
Sous des voûtes de branches où le daim, par ses bonds rapides,
Écarte l’abeille sauvage de la digitale à clochettes.
Mais, quoique je sois heureux d’assister à ces scènes en ta compagnie.
Pourtant, l’aimable causerie avec un esprit naïf,
Dont les propos sont des images de pensées délicates
Est la joie de mon âme ; et, sûrement ce doit être
À peu près la plus haute félicité de la race humaine,
Lorsque dans tes retraites se réfugient doux âmes sœurs.

Mai 1816.
  1. C’est-à-dire puisse sembler de la taille de la main.