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Et craint de se rencontrer avec la mer ; mais il la rencontra
Et frémit ; car la voix écrasante
De l’énorme Encelade l’engloutit avec impétuosité :
Les syllabes massives, comme des flots acharnés
Dans les anfractuosités à demi submergées des récifs,
Bondirent en grondant, tandis que sur son bras encore
Il s’appuyait ; il ne se leva pas, par suprême mépris :
« Ecouterons-nous le géant trop sage,
Ou celui, qui est trop fou, ô Dieux ?
Ni foudre sur foudre, jusqu'à ce que tout
L'arsenal du rebelle Jupiter soit épuisé,
Ni monde sur monde accumulés sur ces épaules.
Ne pourraient me supplicier plus que ces paroles puériles
Prononcées dans cette horrible déchéance.
Pérorez, grondez, clamez, hurlez ! vous tous, Titans endormis !
Oubliez-vous les meurtrissures et les coups flétrissants ?
N’avez vous pas été foudroyés par le bras d’un enfant ?
Oublies-tu, faux Monarque des Vagues,
Le bouleversement de tes mers ? Quoi, ai-je réveillé
Vos torpeurs avec ces quelques mots si simples ?
O joie ! car maintenant je vois que vous n’êtes pas perdus :
O joie ! car maintenant je vois des milliers de regards
Lançant des éclairs de vengeance ! » Sur ces paroles
Il redressa sa haute stature, et debout
Cette fois, sans aucune interruption, il continua ainsi :