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Chaque groupe de notes précipitées me ravissait,
Elles tombaient l’une après l’autre, et pourtant en même temps
Comme des perles s’échappant subitement de leur fil :
Puis encore un autre, puis un autre son,
Chacun semblable à une colombe quittant son perchoir d’olivier,
Avec une musique ailée au lieu de plumes silencieuses,
Pour voltiger autour de ma tête et me faire souffrir
Simultanément de joie et de tristesse. La tristesse l’emporta
Et je bouchais mes oreilles frénétiques
Lorsqu'à travers l’obstacle de mes tremblantes mains,
Une voix m’arriva plus suave, plus suave que toute harmonie,
Et sans cesse elle s’écriait : « Apollon ! Jeune Apollon !
Apollon, splendeur du matin : jeune Apollon ! »
Je m’enfuis, la voix me poursuivait, criant « Apollon » !
O mon Père, o mes Frères, si vous aviez éprouvé
Ma douleur ; O Saturne, si lu l’avais éprouvée,
Vous n’appelleriez pas cette langue trop longtemps entendue
Présomptueuse, parce qu’elle osa espérer être écoutée par vous. »

Jusque là, ses paroles coulèrent, comme le ruisseau timoré
Qui s’attarde sur un lit de cailloux