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Ces deux ailes d'argent s’éployèrent semblables à deux sœurs
Impatientes de faire voguer leur sphère ; les vastes portes
Furent ouvertes sur l’obscur domaine de la nuit ;
Et le Titan du soleil, exaspéré par ce nouveau désastre,
Inaccoutumé à plier, sous une dure contrainte plia
Son esprit à la tristesse du temps ;
Et le long d’une lugubre traînée de nuages
Sur les limites du jour et de la nuit
Il s’étendit, pleurant la défaillance de sa splendeur.
Comme il gisait ainsi prostré, les cieux avec leurs étoiles
Jetèrent sur lui des yeux pitoyables, et la voix
De Cœlus, du haut de l’espace universel,
Murmura tout bas ces solennelles paroles à son oreille :
« O le plus brillant de mes enfants chéris, né sur la terre,
Engendré dans le ciel, Fils des Mystères
Dont aucun n’a été révélé même aux puissances
Qui se concertèrent pour la création ; leurs joies,
Leurs douces palpitations et leurs célestes plaisirs ;
Moi, Cœlus, je m’en étonne : comment vinrent-ils et d’où ?
Et quelles sont d’après leurs fruits leurs formes
Distinctes et visibles ; symboles divins,
Manifestations de cette admirable vie
Eparses et indiscernables à travers l’éternel espace ?
C’est d’eux que tu fus créé à nouveau, o très brillant enfant !