Page:Keats - Poèmes et Poésies, trad. Gallimard, 1910.djvu/313

Cette page n’a pas encore été corrigée

309 POÈMES

Pour qu’ils pussent se voir pendant qu’ils étaient presque endormis ;
Lorsque du flanc d’une colline suburbaine,
Couvrant le gazouillement de l’hirondelle, éclata une fanfare
De trompettes — Lycius sursauta — les sons s’envolèrent,
Mais laissèrent une pensée, un bourdonnement dans sa tête.
Pour la première fois, depuis qu’il avait trouvé asile
Dans ce palais, aux tentures pourprées, du doux péché,
Son esprit franchit ses limites dorées
Et, se parjurant presque, retourna dans le bruit du monde.
La dame, toujours en éveil, pénétrante,
Le remarqua avec chagrin, suspectant chez lui un désir
De plus, de plus que l’empire
De jouissances qu’elle lui donnait ; et elle se mit à gémir et à soupirer
De ce que sa pensée vaguât loin d’elle, sachant bien
Qu'il suffit d’un moment de réflexion pour que tinte le glas de l’amour.
— Pourquoi soupirez-vous, divine créature ? murmura-t-il
— Pourquoi réfléchissez-vous ? riposta-t-elle tendrement :
Vous m’avez désertée ; — où suis-je maintenant ?
Pas dans votre cœur, pendant que le souci pèse sur votre front ;
Non, non, vous m’avez expulsée, et j’erre hors