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XXXIX

Je suis une ombre maintenant, hélas ! hélas !
Sur les confins de l’humaine nature demeurant
Seul : seul je chante la sainte Messe
Agenouillé tandis qu’autour de moi tintent de menus sons de vie,
Que de chatoyantes abeilles volent à midi vers les champs,
Et que plus d’une cloche de chapelle annonce l’heure,
Me transperçant de douleur : ces sons deviennent étranges pour moi,
Et tu es loin de moi parmi les humains.

XL

Je sais ce qui était. Je ressens pleinement ce qui est,
Et je deviendrais fou, si les esprits le pouvaient ;
Pourtant j’oublie le goût de la félicité terrestre,
Cette pâleur réchauffe ma tombe, comme si par moi
Un séraphin sortant des noirs abîmes avait été choisi
Pour me servir d’épouse : ta pâleur me rend heureux ;
Ta beauté enveloppe tout mon être, et je sens
Un amour plus puissant pénétrer mon essence. »