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Exaltait l’idée qu’il se faisait d’une telle fiancée,
Lui donnait même la douce humilité d’un enfant :
Hélas ! la passion au contraire est à la fois douce et sauvage !

VII

Ainsi, une fois de plus, il aurait passé dans l’angoisse et l’insomnie
Une terrible nuit d’amour et de misère,
Si les yeux vifs d’Isabelle n’avaient été fiancés
Avec chaque pensée reflétée sur son front ;
Elle le vit couleur de cire et pâle comme un mort,
Puis soudain tout rougissant ; aussi murmura-t-elle tendrement :
« Lorenzo ! » — là elle interrompit sa timide requête,
Mais dans son ton et son regard il devina le reste.

VIII

  « O Isabelle, je m’aperçois à demi
Que je peux confier ma souffrance à ton oreille ;
Si jamais tu peux croire à quelque chose,
Crois à mon amour, crois que mon cœur
Est près de s’arrêter : je ne voudrais pas t’irriter
En pressant ta main malgré toi, ni blesser
Tes yeux en les fixant ; mais je ne peux vivre
Une nuit de plus sans t’avouer ma passion.