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188 POÈMES ET POÉSIES

   
Sera mon élysée — un livre éternel
D’après lequel je copierai maintes chansons exquises
Sur les feuilles et les fleurs — sur les jeux
Des nymphes dans les bois et les sources ; et l’ombre,
Sentinelle silencieuse auprès d’une vierge endormie ;
Et maintes poésies d’une si étrange inspiration
Que nous nous demanderons toujours où et comment
Elles naquirent. Des fantaisies aussi planeront
Autour de mon foyer et peut-être y découvriront
Des horizons de solennelle beauté, là où j’ai erré
Dans un bienheureux silence, comme le ruisseau vagabond
Qui franchit la vallée déserte, où j’ai trouvé soit un lieu
D’ombre majestueuse, soit une grotte enchantée.
Soit une colline verdoyante couverte d’une parure diaprée
De fleurs, où intimidé par tant de charmes
J’ai écrit sur mes tablettes tout ce que me permettait
Notre sensibilité humaine, tout ce qui s’accordait avec elle.
Alors j’avais embrassé les événements de ce vaste monde
Comme un géant robuste, et mon esprit fut en travail
Jusqu’à ce qu’il pût avec orgueil constater à ses épaules
Des ailes qui remporteraient vers l’immortalité.

Arrête-toi et réfléchis ! la vie n’est qu’un jour ;
Une fragile goutte de rosée dans sa périlleuse descente
Du sommet d’un arbre ; le sommeil d’un misérable Peau-Rouge