Page:Karr - Contes et nouvelles, 1867.djvu/177

Cette page a été validée par deux contributeurs.
171
BERTHE ET RODOLPHE.

d’une union que le père de Berthe avait bénie avant de mourir. Rodolphe était maître de chapelle, et le revenu de sa place donnait aux deux jeunes gens une aisance suffisante.

Rodolphe venait d’acheter une jolie petite maison. Derrière se trouvait un épais couvert de tilleuls ; devant, une verte pelouse sur laquelle se roulait l’enfant. Les murailles blanches étaient tapissées par de grands rosiers du Bengale ; et puis tout cela fermait si bien ! il n’y avait pas la moindre fente aux portes par laquelle pût pénétrer un regard du dehors : les gens heureux sont d’un accès difficile.

Alors mourut l’enfant, et Berthe mourut de chagrin quelques mois après.

Quand elle sentit sa fin approcher, elle dit à Rodolphe :

— En vain je veux me rattacher à la vie par mes prières ; il faut que j’aille rejoindre notre enfant, que je t’abandonne et que j’aille t’attendre dans une vie meilleure. Si la puissance reste aux morts de reparaître sur la terre, tu me reverras ; mon ombre errera autour de toi ; car mon ciel, c’est le lieu où est Rodolphe. Quand le