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CONTES ET NOUVELLES.

valsa avec lui à son tour ; à celui-ci succéda un troisième, puis un quatrième.

Henry était exténué ; une sueur froide coulait sur son front, et il était aussi pâle que les morts.

Une cinquième morte le vint prendre, puis une sixième, et l’on pressait toujours le mouvement de la valse. Henry, épuisé, demi-mort de fatigue autant que d’effroi, voulait se laisser tomber sur l’herbe et ne le pouvait : une force invincible l’entraînait, et il valsait toujours.

L’air ne pouvait plus entrer dans sa poitrine ni en sortir : il étouffait, il voulait crier et il n’avait pas de voix ; alors Anna le reprit à son tour, et l’on pressa encore le mouvement de la valse ; mais Henry sentit que la robe blanche n’était plus remplie que des os d’un squelette ; la main d’Anna, placée sur son épaule, entrait dans sa chair ; il la regarda : elle n’avait plus ses cheveux noirs en bandeaux, il ne vit plus qu’une hideuse tête de mort, toujours couronnée de bruyères blanches.

Il se débattait et le fantôme l’étreignait dans ses bras et l’entraînait dans un mouvement de