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ROMAIN D’ÉTRETAT.

de tendre les appelets ; qu’on prenait les harengs avec des seaux ; que les mauves flamandes, grandes mauves blanches aux ailes noires, qui suivent les bancs de harengs, étaient si nombreuses, qu’elles venaient prendre les harengs jusque sur les bateaux, et que, pour les écarter, on était forcé de les abattre à coups de bâton.

— Ah ! ajoutent-ils, quand nous revenions le matin au soleil levant, nos paletots étaient couverts d’écailles de hareng, véritables pièces de dix sous. Aujourd’hui, les kiens (chiens de mer) nous mangent les harengs et les seines.

Il est impossible de leur faire admettre à ce changement de route des harengs d’autre raison que l’exil de l’empereur. Il n’y a rien d’égal à leur vénération pour sa mémoire, si ce n’est leur haine pour les chiens de mer ; il y a dans leur manière de prononcer le mot kiens quelque chose de féroce à la fois et de dédaigneux. Il faut dire que les chiens de mer leur font un grand tort.

Rien n’est si simple que les appelets destinés à la pêche du hareng : ce sont de longues pièces de filet tendues, tirées en bas par des pierres, soutenues en haut par des barriques vides. Le