Page:Karr - Contes et nouvelles, 1867.djvu/113

Cette page a été validée par deux contributeurs.
107
ROMAIN D’ÉTRETAT.

mes, hérissés d’aspérités et de pointes. À Étretat, au contraire, où il n’y a pas de terre au bord de la mer, où il ne se détache qu’à des espaces très-éloignés quelques morceaux de rocher, ce sont les mêmes pierres, toujours roulées, toujours sassées, ressassées, usées, polies, qui forment le bassin, de sorte qu’elles sont presque toutes ou rondes ou en forme d’œufs ; on y trouve souvent des sortes d’agates d’une belle couleur.

La fontaine, ainsi s’appelle la place que nous avons désignée, et où coule sous les galets l’ex-rivière d’Étretat, est le lieu de réunion le plus important du pays ; là, tous les jours, à la marée basse, parfois même la nuit avec des lanternes, car il faut obéir à la marée et non au cadran de l’horloge, là, les femmes, réunies pour laver, jasent et babillent tous les jours pendant plusieurs heures ; chacune apporte le produit de sa chasse, c’est-à-dire tous les bruits, toutes les rumeurs, qu’à Paris on appelle cancans, potins en Normandie, et ramages dans les Ardennes.

Quelqu’un dont les femmes ne se défieraient pas et qui pourrait les entendre à la fontaine