Page:Karl Marx et Friedrich Engels, Œuvres choisies en deux volumes, tome II, 1955.djvu/493

Cette page a été validée par deux contributeurs.

séquence forcée des besoins du marché. Depuis 1825 l’invention et l’application des machines n’est que le résultat de la guerre entre les maîtres et les ouvriers. Encore ceci n’est-il vrai que pour l’Angleterre. Quant aux nations européennes, elles ont été forcées d’appliquer les machines par la concurrence que les Anglais leur faisaient, tant sur leur propre marché que sur le marché du monde. Enfin, quant à l’Amérique du Nord, l’introduction des machines était amenée et par la concurrence avec les autres peuples et par la rareté des mains, c’est-à-dire par la disproportion entre la population et les besoins industriels de l’Amérique du Nord. De ces faits vous pouvez conclure quelle sagacité M. Proudhon développe, en conjurant le fantôme de la concurrence comme troisième évolution, comme antithèse des machines !

Enfin, en général, c’est une vraie absurdité, que de faire des machines une catégorie économique à côté de la division du travail, de la concurrence, du crédit, etc.

La machine n’est pas plus une catégorie économique que le bœuf qui traîne la charrue. L’application actuelle des machines est une des relations de notre régime économique actuel, mais le mode d’exploiter les machines est tout à fait distinct des machines elles-mêmes. La poudre reste la même, que vous vous en serviez pour blesser un homme, ou pour panser les plaies du blessé.

M. Proudhon se surpasse lui-même, lorsqu’il fait grandir à l’intérieur de sa tête la concurrence, le monopole, l’impôt ou la police, la balance du commerce, le crédit, la propriété dans l’ordre que je cite. Presque toutes les institutions du crédit étaient développées en Angleterre au commencement du xviiie siècle avant l’invention des machines. Le crédit public n’était qu’une nouvelle manière d’élever l’impôt et de suffire aux nouveaux besoins créés par l’avènement de la classe bourgeoise au gouvernement. Enfin la propriété forme la dernière catégorie dans le système de M. Proudhon. Dans le monde réel au contraire la division du travail et toutes les autres catégories de M. Proudhon sont des relations sociales, dont l’ensemble forme ce qu’on appelle actuellement : la propriété : la propriété bourgeoise n’est rien en dehors de ces relations qu’une illusion métaphysique ou juridique. La propriété d’une autre époque, la propriété féodale se développe dans une série de relations sociales entière-