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fois ; Sylvain est torturé par la jalousie et par l’amour-propre froissé, il aurait voulu voir Claudie repentante ; mais elle se renferme dans son désespoir et sa fière résignation ; elle veut se punir elle-même pour sa faute, en ne se permettant plus d’aimer. En ce moment réapparaît Denis Ronciat. Il manque de dignité, mais il a un amour-propre immense. Il veut donc avant tout sortir de la position ridicule, où, selon lui, il se trouve, grâce à la Grand’Rose. Toute la paroisse est en émoi, on le montre au doigt, les enfants lui crient : « Ah ! coquin ! tu as fait chasser le père Rémy, mais voilà Mme Rose qui le ramène en triomphe !… » Ronciat s’imagine reconquérir sa réputation, en étonnant tout le monde. Il veut « trouver quelque chose » à quoi personne ne s’attend ; il ne sait pas encore lui-même ce qu’il fera (tout son naturel de fanfaron imbécile se trahit dans ses paroles), mais il veut épater son monde. Et à cette fin, il offre soudain sa main à Claudie. Elle la refuse. Rémy qui, pendant tant d’années, ne s’était pas vengé sur Ronciat, craignant que sa petite-fille continue à l’aimer en secret, voyant à présent qu’elle a vraiment abjuré son ancien amour, s’avance droit sur lui. Il n’avait attendu que le moment où Ronciat aurait expié ses torts envers elle, à présent il sait ce qu’il a à faire. Il le prend au collet, le secoue durement, puis le chasse de sa présence.

Maintenant c’est le tour de Sylvain de se repentir de sa jalousie et de sa brutalité ; il demande à Claudie de devenir sa femme. Mais elle, malgré toutes ses prières, celles de la Grand’Rose, de la mère Fauveau et même celles du père Fauveau, refuse. Elle a juré de ne jamais se marier. C’est seulement lorsque son aïeul la libère de son serment, qu’elle donne, en pleurant, son consentement. À ce moment on entend le son de la cloche. « À genoux, dit le père Rémy, c’est l’Angélus qui sonne. C’est l’heure du repos, qu’il descende dans nos cœurs, le repos du bon Dieu, à la fin d’une journée d’épreuves… Demain cette cloche nous réveillera pour nous rappeler au travail, nous serons debout avec une face joyeuse et une conscience épanouie. Car le travail ce n’est point la punition de l’homme… c’est sa récompense et sa force… c’est sa gloire et sa fête… Je suis guéri et je vais donc enfin pouvoir