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Maurice ne tarda pas ; il se jeta dans mes bras. Je le trouvai changé, grossi, vieilli, les cheveux presque blancs, s’exprimant avec difficulté. « C’est plus que la moitié de moi-même que je perds », me dit-il.

Mme Maurice nous avait fait servir à dîner. Pendant que nous étions à table, Maurice, en voyant Dumas, l’embrassa. Dumas reçut cette caresse avec froideur, ne croyant, mais à tort, ni à son affection ni à son chagrin, pour des raisons qui datent de plusieurs années[1]. À ce moment on apporta une dépêche de Paris. C’était la Société des gens de Lettres qui priait Dumas de profiter de l’occasion pour faire un discours au nom de la Société. Il déclara n’en vouloir rien faire, n’étant pas membre de cette association et pensant avec raison qu’elle aurait pu envoyer une délégation spéciale ou tout au moins un représentant.

Étaient installés au château, en plus de la famille habituelle, Solange, que Maurice avait prévenue par une lettre envoyée à Paris, mais sans l’inviter à venir, qui était venue néanmoins[2] et n’avait cessé de veiller au chevet de sa mère avec sollicitude ; le docteur Favre, Oscar Cazamajou, René Simonnet, Edme et Albert Simonnet, Mme Simormet leur mère, Aucante, MM. Amic et Plauchut.

Boutet, le factotum de Mme Sand à Paris[3], et qui était casé dans les environs, voulut m’emmener, mais Mme Maurice avait eu la bonté de demander au docteur Pestel de vouloir bien m’accueillir dans sa belle habitation de Saint-Chartier. À 10 heures, par une nuit noire et une pluie battante, je m’y rendis en compagnie de Paul Meurice et de Lévy qui devaient y demeurer également.

Nous fûmes admirablement accueillis par le docteur et sa femme. Nous restâmes à causer jusqu’à 11 heures et demie, et comme notre hôte avait constamment soigné Mme Sand pendant sa maladie, je lui fis raconter, en présence de mes compagnons, les derniers moments de cette femme aussi bonne qu’illustre[4]

  1. Nous faisons remarquer une fois de plus que le texte imprimé diffère en beaucoup d’endroits du manuscrit autographe de M. Harrisse ; ces lignes y manquent et le commencement de la phrase est changé.
  2. Dans le texte imprimé on lit : « Étaient installés au château outre les hôtes habituels ; Mme Clésinger (Solange Sand) qui, prévenue de l’état désespéré de sa mère par une dépêche de son notaire, était venue de Paris en toute hâte ; des parents : Oscar Cazamajou, le docteur Favre, etc., etc. »
    On voit par ce qui précède que tout ceci n’est pas tout à fait exact.
  3. C’était un ami de Mme Sand, surtout depuis son séjour de Palaiseau, et nullement son factotum. — W. K.
  4. Ce passage est changé dans la plaquette imprimée ; les trois passages qui y suivent manquent dans l’autographe. Ils sont inexacts comme chronologie et comme faits, se rapportant à la manière dont ce manuscrit fut muni de notes par le docteur Pestel, renvoyé à M. Harrisse, puis corrigé et complété par ce dernier. Nous avons dit plus haut comment tout cela s’était passé.