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cante adressait à Calmann Lévy, nos seules sources d’information. Le jeudi 8 juin 1876, en revenant d’accompagner Flaubert, chez qui nous avions trouvé une lettre de la pauvre Martine[1] et une copie au crayon d’une dépêche de M. Plauchut, laissée par Lambert, annonçant que Mme Sand était au plus mal, je reçus vers les 6 heures un télégramme ainsi conçu :

La Châtre, 4 h. 46 du soir.
Ma mère est morte.
Maurice Sand.

J’allai immédiatement communiquer cette triste nouvelle à Dumas ; il l’avait également reçue. Nous convînmes de nous prévenir mutuellement de l’heure et du lieu des obsèques afin d’y aller ensemble.

Le lendemain matin, 9 juin, plusieurs journaux, les Débats entre autres, annonçaient que Mme Sand serait inhumée à Paris. Cette nouvelle me parut invraisemblable. Effectivement, à 8 heures, un mot de Mme Dumas me faisait prévenir que c’était à Nohant qu’auraient lieu les funérailles et que son mari m’attendrait à la gare du chemin de fer d’Orléans, le jour même, à 10 heures du matin. Je fis préparer ma valise à la hâte ; le temps était abominable, une pluie fine, serrée, froide, des rafales d’un vent âpre, on se serait cru en octobre. À la gare je trouvai sept personnes parmi lesquelles Lambert, Cadol, M. Borie et Calmann Lévy. Dumas arriva quelques instants après. Dumas, Cadol, Paul Meurice, Lévy et moi nous occupions le même compartiment.

Nous arrivâmes à Châteauroux à 3 heures un quart ; la pluie ne cessait de tomber, le sol était complètement détrempé. Il n’y avait à la gare que la diligence et les deux petites pataches qui desservent habituellement la route de La Châtre. Grâce à un ami de collège de Dumas, capitaine de hussards, je trouvai chez un carrossier une espèce de berline que je louai pour deux jours, et à 4 heures nous nous mîmes en route pour Nohant, avec l’intention de coucher à La Châtre dans une auberge de rouliers, faute de mieux.

À 7 heures du soir nous étions à Nohant, on finissait le dîner. Nous attendîmes dans le jardin. Favre vint à nous et, prenant Dumas à l’écart, il lui raconta dans les plus grands détails la maladie et la mort de notre illustre amie.

  1. Femme gardant le logement de Mme Sand à Paris, elle était ouvreuse à l’Opéra-Comique.