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Mme Sand craignait que Maurice n’acceptât point cet héritage, elle insistait pour qu’il lui envoyât en toute hâte une procuration ; sa lenteur, son hésitation à faire un petit sacrifice, afin de terminer au plus vite cette affaire sans procès, la fâchaient. Mme Sand reproche aussi à son ami défunt de « n’avoir aimé, personne ces six derniers mois » et ne plus s’être inquiété de son avenir à elle et de lui avoir donné tant de soucis par son testament.

Toutes ces craintes et toutes ces préoccupations — fort déplaisantes au fond — étaient vaines. Les dames de la famille Manceau ne demandèrent pour leur part que quelques pauvres hardes et la montre de leur fils et frère — comme des reliques à garder — et le père de Manceau déclara que Mme Sand avait bien assez fait pour eux et qu’il n’avait aucune prétention sur quoi que ce soit. L’affaire fut donc heureusement terminée et le 30 octobre Mme Sand écrivait à Maurice :

Paris, 3 octobre 1866.

J’étais en colère contre toi, mais ta lettre m’a fait tant rire avec les aiguilles à tricoter de ce monsieur de chaque côté de sa gueule, que je n’y pense plus. Et puis ta procuration est arrivée à temps et Boutet a signé pour toi ; c’est une affaire finie. Il n’a pas été question de pension ni de transaction d’aucun genre. J’ai accepté les dettes de la succession qui ne dépassent pas la somme qui figure dans la note que je t’ai envoyée, et on a compris que c’était bien assez. J’ai donné la montre à Laure et voilà. Le père a été très bien, il ne voulait même pas entendre la transaction ni le testament, disant qu’il venait pour signer et non pour discuter, qu’il me devait tout et n’avait rien à me réclamer. C’est plutôt la mère qui aurait réclamé quelques misères. Mais, en somme, tout est terminé, et sans te coûter, dans le présent ni dans l’avenir, un centime. Tu vois que les craintes de nos amis et les nôtres étaient chimériques et que Manceau connaissait mieux que nous l’inoffensivité de ses parents. Le danger d’un mauvais conseil n’en existait pas moins, et il ne l’avait pas prévu. Je redoutais cela, j’étais pressée d’en finir. La conclusion est excellente pour toi, car si j’ai laissé gaspiller beaucoup d’argent il ne t’en reste pas moins un immeuble qui représente la moitié au moins du produit de Villemer, et sur lequel nous pourrions gagner en le vendant plus tard, si nous le voulons tous deux. Les parents ont renoncé purement et simplement à leur droit, sans autre compensation que de n’avoir pas à payer les quelques dettes qui me