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Je serais restée davantage, s’il m’avait laissée ici plus longtemps, mais il veut me remmener et je ne veux pas que tu restes seule. Je t’embrasse mille fois.

Ta mère.

Il m’a lu ta lettre, qu’elle est gentille et bonne !

À Charles Poncy.
Palaiseau, 25 août 1865.

… Il y a quatre mois que nous n’avons mis le pied à Paris. Il y a quatre mois qu’il se meurt. Les intervalles d’espérance étaient illusoires. Il y a six semaines que je le sais, et pourtant, on espère jusqu’à la dernière heure.

À présent c’est fini. Je l’ai conduit au cimetière le 23. Il est mort le 21. Il a eu une rapide agonie après un lourd et profond sommeil. Mais pour en venir là, comme il s’est vu mourir, jour par jour, heure par heure !

Maurice est accouru pour m’aider à l’ensevelir, et nous partons ensemble demain pour Nohant où je passerai quinze jours. Je reviendrai pour affaires. Je retournerai là-bas pour les couches de ma belle-fille. Mais je vivrai à Palaiseau avec mon cher et profond souvenir.

Je suis brisée de fatigue. Que de soins, que de veilles, que d’angoisses. Rien n’a pu le sauver. Tout avait, tout a été essayé. L’iode ne faisait rien. Rien ne faisait… Vous qui savez ce que c’est que de disputer un être chéri à la mort, vous apprécierez mon immense douleur.

À monsieur André Boulet.
Nohant, 28 août 1865.

Chers excellents amis, je vous donne de mes nouvelles, selon ma promesse. Je me porte bien. Je suis arrivée sans fatigue de voyage ; j’ai dormi, j’ai mangé, j’ai causé avec mes enfants, j’ai repris la vie comme si de rien n’était, je n’en suis pas moins brisée et j’éprouve au physique comme au moral, la lassitude de quelqu’un qui sortirait de la torture. Il me faudra, je pense, quelque temps pour me retrouver et me reconnaître.

À votre tour de me parler de vous, des chers enfants et des bienaimés parents, chère famille qui s’est faite mienne avec tant de cœur