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mation de la République à Nohant-Vic, et le lendemain de sa rentrée à Paris elle la décrivit dans une lettre pleine de verve au Rédacteur de la Réforme, lettre non signée, parue dans ce journal le 23 mars. En reproduisant dans son article la description de cette petite fête naïve, mais fort ingénieusement mise en scène, M. Monin dit que la fête même n’aurait pas eu lieu le 19, comme on aurait pu le croire d’après la date du numéro de la Réforme, mais bien « dimanche le 12 mars », parce que George Sand l’aurait décrite le samedi 18 mars, « en déjeunant chez Pinson ». En avançant cela, M. Monin devait bien involontairement se fier aux dates des lettres imprimées dans le volume III de la Correspondance de George Sand : « Paris, 14 mars » en tête de la lettre à Duvernet, et « Paris, 18 mars » en tête de celle à Maurice Sand. Mais ces désignations sont tout aussi fausses que les dates mises au bas des Lettres au Peuple : « Paris, 7 mars » et « Paris, 19 mars ». La lettre à Duvernet, comme nous venons de le dire, fut écrite de Nohant, ainsi que la Seconde Lettre au Peuple, et la lettre à Maurice, de Paris, mais après le 19 mars, comme on peut aisément le voir par la lettre inédite que voici, adressée à Mme Viardot :


Nohant, 17 mars 1848.

Ma fille chérie, dans quelques jours je vous serrerai dans mes bras. Oui, je suis heureuse, malgré mes cruels embarras de finances qui allaient finir et qui renaissent sous le coup de cette crise, malgré les montagnes de difficultés misérables auxquelles on se heurte en province, malgré les dangers que nous suscitent les polirons. Si je ne retournais à Paris, où le contact de ce pauvre peuple si grand et si bon m’électrise et me ranime, je perdrais ici, non la foi, mais l’enthousiasme. Ah ! nous serons républicains quand même, fallût-il y périr de fatigue, de misère, ou dans un combat. C’est la pensée, le rêve de toute ma vie qui se réalise, et je savais bien qu’elle ferait tressaillir votre généreux cœur.

Mes chagrins personnels, qui étaient arrivés au dernier degré d’amertume, sont comme oubliés ou suspendus…

Mais ne parlons pas de nous-mêmes, chacun a son ver rongeur et doit se laisser ronger sans y songer, car il y a de grands devoirs qui réclament tout notre temps, toutes nos forces, toute notre âme. Vous