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Il y en a donc bien peu, ou leurs théories sont bien inconciliables avec celles de la majorité communiste. S’il existe une poignée de pauvres fanatiques qui ne se rattachent ni au plan inachevé, et essentiellement pacifique de Pierre Leroux, ni à l’utopie romanesque et non moins pacifique de M. Cabet, n’existe-t-il pas aussi parmi vous des fanatiques de la richesse, des monarchistes exaltés qui auraient applaudi à un massacre général du peuple le 24 février ?…

Tranquillisez-vous donc ! Le communisme ne nous menace point. Il vient de donner des preuves signalées de sa soumission légale à l’ordre établi, en proclamant son adhésion à la jeune République. Il a beaucoup d’organes différents, car c’est à l’état d’aspiration qu’il a le plus d’adeptes ; il en a jusque parmi les riches ; il en a chez toutes les nations et à tous les étages de la science et de la hiérarchie sociale ; il y en a qui ne sont point enrégimentés sous une bannière d’organisation, qui ne font partie d’aucune secte[1], parce qu’ils n’en trouvent pas la formule satisfaisante, et qu’ils aiment mieux conserver dans leur âme un idéal pur, que de l’exposer à des essais infructueux ; ceux-là aussi ont une foi inébranlable, et, s’ils avaient encore cent ans à vivre, sous un Louis-Philippe, ils mourraient avec la même conviction ; car le communisme, c’est le vrai christianisme, et une religion de fraternité ne menace ni la bourse, ni la vie de personne.

Eh bien, de tous les organes de la foi communiste, pouvez-vous en citer un seul qui ait protesté contre les lois qui régissent la propriété légitime et la sainteté de la famille ?

Qu’ont-ils donc fait pour vous épouvanter ? Rien, en vérité, et vous êtes troublés par un cauchemar !

Quant au peuple, vous le calomniez en disant qu’il penche vers le communisme immédiat. Le peuple, plus sage et plus brave que vous, ne s’alarmerait pas de quelques démonstrations coupables, il les réprimerait, et, loin de perdre sa foi dans l’avenir, il tirerait de ces excès une patience plus belle et une justice plus ferme… »

Ces Lettres et brochures ne furent publiées que grâce au secours actif que Charles Duvernet et Victor Borie prêtèrent à George Sand ; le premier dirigeait le groupe républicain de la Châtre, et tous les deux étaient alors des compagnons d’armes et les

    qui effraie ? Et ce mot d’ailleurs est-il, sera-t-il le mot de l’avenir ? Il n’embrasse qu’un côté du problème, l’unité, mais il laisse entièrement dans l’oubli l’autre l’individualité, la liberté. Se dire communiste, c’est bien grave. Je regrette beaucoup que vous ayez pris cette détermination ! Quelle arme aux adversaires !… »

  1. C’est encore nous qui soulignons.