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ment ab adverso dans la décision de Maurice Sand, ce fut le fait que la mère de Lina Calamatta, Mme Anne-Joséphine Calamatta, une femme charmante et une nature d’élite, une vraie artiste[1], cette distinguée personne, catholique fervente dès sa jeunesse, tomba peu à peu sous l’influence exclusive des prêtres. (Plus tard, après la mort de son mari, elle se fit même religieuse et mourut le 10 décembre 1893 sous le nom de sœur Marie-Josèphe de la Miséricorde.) Luigi Calamatta et sa fille, durant bien des années, souffrirent d’incidents pénibles et révoltant leurs idées, leurs sentiments d’époux et de fille. L’intransigeance de Mme Joséphine les froissait, et sous les traits de différents pères spirituels, confesseurs de Mme Calamatta, le cléricalisme envahissait leur foyer.

George Sand, ayant depuis longtemps franchi toutes les étapes de Spiridion, et acheté au prix de grandes souffrances morales sa foi libre, son credo, rejetait toutes les pratiques et toutes les formalités du culte. Elle niait la divinité du Christ, l’existence du diable et de l’enfer — qu’elle appelait une monstruosité, « une imposture et une barbarie » — et protestait surtout contre le dogme du châtiment éternel[2]. Il est tout naturel qu’elle fût révoltée et douloureusement peinée de tout ce qui se passait alors autour d’elle. La domination spirituelle absolue, annihilante, exercée par leurs confesseurs sur des jeunes femmes et des jeunes filles inconnues ou connues exaspérait Mme Sand. Autrefois, lors du séjour de sa fille dans un pensionnat, elle s’était efforcée de mettre Solange en garde contre le culte extérieur masquant la religion même, elle voulait la préserver du mysticisme sensuel du catholicisme et ne pas lui laisser prendre pour

  1. Elle peignait fort bien à l’huile et au pastel et nous avons vu au salon de Nohant plusieurs tableaux et portraits dus à son pinceau et à ses crayons.
  2. Que nos lecteurs se souviennent encore une fois des mots de Renan pris par nous comme épigraphe de notre travail et qu’ils ne nous rendent pas responsables des opinions de Mme Sand, nos idées religieuses différant sur bien des points de ses croyances et de son credo social et religieux.
    En qualité d’historien fidèle nous sommes obligé de rapporter et de citer exactement toutes les idées et expressions de George Sand, quelque hérétiques qu’elles puissent nous paraître. Nous prions nos lecteurs de ne point nous en croire solidaire ni responsable. — W. K.