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rature constante et assez élevée de ce petit vallon. L’eau de la rivière paraissait à Mme Sand souveraine pour les maladies d’intestins et de reins. Enfin la possibilité de se cacher pour plusieurs jours dans un endroit où n’arrivaient ni les lettres demandant des réponses, ni les visiteurs importuns, où l’on pouvait, en toute liberté, travailler dans un calme absolu et dans le milieu le plus primitif, dans une maisonnette déserte tant recherchée par George Sand, — tout cela fit qu’elle se prit à rêver d’habiter Gargilesse, ne fût-ce que pendant une dizaine de jours, ou de pouvoir s’y réfugier de temps à autre.

Alors Manceau, toujours prompt à se décider quand il s’agissait de faire plaisir à autrui ou de rendre service à quelqu’un de ses proches, prêt surtout à tous les sacrifices pour Maurice et pour sa mère, acheta l’une des maisonnettes qui plaisait à Mme Sand. On commença immédiatement à la réparer et à l’arranger, afin que chacun y eût son petit coin, lors des séjours à Gargilesse.

Ces excursions aux bords de la Creuse par les journées brûlantes de juillet, les chasses aux lépidoptères et aux scarabées, faites par les jeunes entomologistes en plein midi, les causeries avec le pêcheur de l’endroit, Moreau du Pin, les déjeuners champêtres au bord de la rivière, les escalades des rochers et des pics, bref, tout le séjour à Gargilesse et l’acquisition de la maisonnette, George Sand le décrivit avec une verve, un entrain et une poésie incomparables dans une série d’esquisses intitulées Promenades autour d’un village, mais imprimées d’abord sous le titre de Courrier de village dans le Courrier français de 1857.

Selon une habitude de théâtre, George Sand y fit apparaître tous ses compagnons de voyage, non pas sous leurs vrais noms, mais sous leurs noms de guerre ou sobriquets. C’est ainsi que Manceau s’appelle du nom d’un rare papillon attrapé par lui : Amyntas, Depuiset — toujours à la recherche des chrysalides — Chrysalidor, Maurice : Parthénias ; Mlle Bérangère doit à sa blancheur de teint et à sa pureté le nom de Herminea, Mme Sand elle-même voulait aussi s’appeler du nom d’un papillon rare trouvé par elle, mais « ne le fit pas par modestie ».