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Deux autres romans de George Sand doivent également leur existence à cette passion pour tout ce qui est théâtre, dans deux sens différents : la Filleule, publiée en 1853, reflète cet amour de l’auteur pour le théâtral, le romanesque à outrance qui, malheureusement, trouvait une pâture toujours renouvelée dans les comédies improvisées et les pièces de marionnettes, jouées à Nohant ; Adriani est l’histoire d’une pauvre femme qui se meurt de désespoir après la mort de son mari et que le chant inspiré d’un artiste ramène à la vie. Il y a tel trait de caractère de cet Adriani qui rappelle le grand chanteur Nourrit ; désireux de donner son art et son talent gratis à ceux qui sont capables d’en jouir et d’en profiter, il voudrait en même temps se dérober aux ovations de la foule et il est insensible à la vanité. Mais ce n’est pas lui, ni la malheureuse Laure qu’il console, qui nous intéressent dans ce roman, c’est son valet de chambre, Comtois.

Ce bonhomme-là qui, entré au service d’Adriani, nous raconte à sa manière dans un journal qu’il tient ad hoc, tous les événements de la vie de son maître, c’est lui qui nous ravit, on éprouve un si grand plaisir à lire ses amusantes élucubrations, que lorsque au cours du roman, elles sont de plus en plus souvent interrompues par la narration des amours de Laure et Adriani[1], puis leur font définitivement place, on le regrette sincèrement. Et le biographe de George Sand doit, à ce propos, noter une fois de plus l’infiltration inconsciente du réalisme dans les œuvi-es du plus romanesque des romanciers.

En 1859, année de la publication de Constance Verrier, fut jouée Marguerite de Sainte-Gemme. On trouve, au début de la pièce, certaines données qui, mieux développées, auraient pu servir à rendre intéressants les deux personnages principaux, mari et femme (à ce propos il faut remarquer que l’auteur nous laisse ignorer jusqu’au bout pourquoi cette dame continue à s’appeler de son nom de jeune fille après tant d’années de vie conjugale avec le sieur Désaubiers). Il y a, dans les rôles

  1. C’est sous ce titre que le roman fut publié par Hetzel en Belgique, avant sa publication dans le Siècle.