notes, elle l’expédia à Louis Blanc, en le priant de l’insérer dans le Siècle. Toutefois, le rédacteur de ce journal, dont la couleur « était, selon Louis Blanc, celle de M. Odilon Barrot », refusa d’insérer l’article de Mazzini, tout en répondant de la manière la plus aimable, « qu’il n’était pas de journal pour lequel un peu de prose de George Sand ne fût une bonne fortune », mais trouvant que « dans le moment actuel il n’était pas utile de critiquer trop vivement la conduite du pape[1] ».
C’est de ces pourparlers à propos de l’impression de la Lettre au Pape que George Sand parle dans sa lettre à Mazzini du 22 janvier 1848, écrite surtout pour le remercier de son désir de lui voir garder, en souvenir de lui, la bague qu’elle avait retrouvée.
Oui, mon ami, je la reçois avec reconnaissance et avec bonheur cette chère bague dont je n’ai pas besoin pour penser à vous tous les jours de ma vie, mais qui sera pour moi une relique sacrée dont mon fils héritera. Il en est digne ; car il a la religion des souvenirs comme vous.
En disant que j’ai pensé à vous tous les jours de ma vie, ce ne sera pas une formule vaine. Je mentirais si je disais que je pense tous les jours à tous mes amis. Mais comme les chrétiens ont certains bienheureux de préférence auxquels ils s’adressent chaque soir dans leurs prières, je puis dire que j’ai certaines affections sérieuses sur cette terre et ailleurs, dont la commémoration se fait naturellement dans mon âme chaque fois qu’elle s’élève vers Dieu, dans la douleur et dans la foi. Oui, je vois bien qu’il faut que vous alliez en Italie[2], tôt ou tard. Je sais bien que vous lui devez votre vie ou votre mort. C’est notre
- ↑ Expressions d’une lettre inédite de Louis Blanc à George Sand. Nous avons retrouvé dans les papiers de George Sand des lettres inédites et fort intéressantes de Louis Blanc se rapportant à ses démarches pour placer l’article de George Sand. Elles sont datées des 5 et 22 janvier 1848. Louis Blanc joignit à cette dernière lettre celle qu’Emmanuel Arago lui avait adressée à la même date, et la lettre de M. Chambolles, rédacteur du Siècle, datée du 16 janvier.
- ↑ Ces mots encore ne pouvaient être écrits nullement en 1851, comme le prétend la date dans la Correspondance, lorsque Mazzini était déjà revenu à Londres après la défaite de la révolution en Italie, mais bien alors qu’il était encore à Londres. On sait que Mazzini avait quitté cette ville et se rendit en Italie en février 1848 pour n’en revenir qu’en 1850.