Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/212

Cette page n’a pas encore été corrigée

procès. Je vous dirai des choses qui vous étonneront bien, mais qu’il est inutile de confier au papier.

J’ai embrassé ce soir, dans la rue, votre ami de Ribérac[1], libre pour vingt-quatre heures sur le pavé de Paris et partant cette nuit pour Bruxelles avec un autre dont vous verrez le nom dans les journaux[2]. La personne que vous savez a été à cet égard d’un chevaleresque accompli, et il y a autour de cela des circonstances qui ébranleront toutes vos idées sur son compte, et qui, pour le mien, m’enchaînent sérieusement par une estime personnelle en dehors de toutes les idées politiques, invariables chez moi, comme vous pensez bien.

Il faut, en effet, beaucoup de prudence et de discrétion en ce qui me concerne. Je ne crains nullement de me compromettre pour mon compte ; mais je peux faire quelque bien à ceux qui souffrent, et il est inutile de susciter des difficultés. Je crois que je les vaincrais toutes, mais cela me retarderait…

Au prince Louis-Napoléon Bonaparte.
Paris, 12 février 1852.
Prince,

Permettez-moi de mettre sous vos yeux une douloureuse supplique : celle de quatre soldats condamnés à mort, qui, dans leur profonde ignorance des choses politiques, ont choisi un proscrit pour leur intermédiaire auprès de vous. La femme du proscrit[3], qui ne demande et n’espère rien pour sa propre infortune et qui ne connaît pas plus que moi les signataires de la pétition, m’écrit, en me l’envoyant, quelques lignes fort belles, qui vous toucheront plus, j’en suis certaine, que ne le ferait un plaidoyer de ma part. La pauvre ouvrière désolée, réduite

    déclarer qu’on « saurait contrecarrer » les dites démarches, qu’on parlait même déjà du « bannissement de Périgois » ; ils disaient encore que « tout s’organisait à Châteauroux », mais que « ces messieurs faisaient autoriser toutes leurs petites infamies par le ministre de manière à se couvrir ainsi de ce grand mot : les ordres viennent de Paris… » et que « le Grand Lama du pays » était revenu tout déconfit de n’être rien, et s’en dédommageait en jouant le désintéressé et en allant demander des grâces pour le semblant, comme disent les enfants…
    Il est évident que l’entrevue de Mme Sand avec M. de Persigny n’était pas restée sans influence sur cette « déconfiture « du « Grand Lama » de Châteauroux. Cette lettre porte de la main de George Sand : « Answered, le 10 février. »

  1. C’était justement Marc Dufraisse.
  2. C’était Greppo.
  3. C’était Lise Perdiguier, et sa lettre a été gardée par George Sand. Nous avons raconté les relations de George Sand avec les écrivains-prolétaires dans le volume III de notre ouvrage.